Posture freelance : comment passer d’exécutant•e à partenaire ?

Quand on bosse en freelance, on glisse vite en mode exécutant·e… au détriment de notre valeur. Et si on apprenait à adopter une vraie posture de partenaire ? Je partage pourquoi c’est clé pour ton business, et surtout comment construire cette posture pas à pas.

Gestion de projet Tarification

Quand on bosse en freelance, on a tous déjà connu ça : au début d’une nouvelle mission, on veut bien faire, on dit oui, on exécute, on ajuste… et sans trop s’en rendre compte, on se retrouve finalement à subir la relation client. On a glissé en mode « exécutant•e », alors qu’on aimerait justement travailler en  » partenaire « , apporter de la valeur, donner notre avis d’expert•e, co-construire, conseiller. Bonne nouvelle : ça s’apprend !

Dans cet article, on va voir ensemble pourquoi c’est un terrain glissant et comment adopter pas à pas une posture de partenaire solide et pro.

Pourquoi on a parfois tendance à adopter une posture d’exécutant·e en freelance ?

On dit oui à tout, surtout au début

Quand on démarre, on a ce fameux réflexe du « il faut que je prouve que j’assure ». On veut faire plaisir au client, on a peur de décevoir… et on se met à dire oui à tout : les ajustements de dernière minute, les demandes hors périmètre, les délais impossibles.

Je me souviens très bien de mes débuts : mes premières missions manquaient de cadre, c’était la porte ouverte aux aller-retours à gogo, aux changements d’avis du client en plein milieu du projet, aux discussions sans fin où on demandait l’avis de tout le monde alors que c’était moi l’experte mais que je n’osais pas affirmer ma vision.

La faute au client ? Que nenni ! En tant qu’indé c’est à nous de poser le périmètre de la mission, de communiquer nos règles du jeu et de cadrer avec bienveillance les échanges pour donenr le rythme et assurer une qualité de travail !

On pense que c’est temporaire. Mais si on ne change pas vite le curseur, ça devient un mode de fonctionnement par défaut.

On manque de clarté sur notre rôle (et nos offres)

Si on n’est pas clair avec soi-même sur ce qu’on propose, comment on travaille et où s’arrête notre périmètre, c’est mission impossible pour le client de le deviner.

Résultat : c’est lui qui construit la mission en fonction de ses envies, de son rythme, de ses méthodos. Et hop, on glisse en mode exécutant·e, en subissant la gestion de projet… au lieu de l’orchestrer.

Voici quelques situations très parlantes qu’on rencontre souvent :

  • Un graphiste qui n’a pas formalisé sa méthodologie et qui n’a pas expliqué sa posture. Résultat : au lieu de suivre un process structuré et de se fier à l’expertise/la vision de son prestataire, le client commence à donner des instructions ultra précises, allant parfois à l’encontre de l’intérêt stratégique de son besoin (« mets le orange plus flashy », « mon neveu préfère cette typo-là ») et multiplie les micro-retours hors cadre. On passe du rôle de DA à celui de “main qui exécute les goûts du client”… et ça peut vite devenir interminable.
  • Une rédactrice qui n’a pas précisé dans son devis le nombre de versions ou de validations. Le client revient avec 5, 6, 7 séries de retours (« j’ai montré le texte à ma cousine / à mon boss / à mon chien »), chaque retour étant de plus en plus éloigné du brief initial. La rédactrice, au lieu d’accompagner la réflexion éditoriale, se retrouve à “ajuster sans fin” des demandes contradictoires.
  • Une consultante en stratégie qui n’a pas défini son rôle exact en comité projet. Résultat : le client lui envoie des invitations à toutes les réunions internes, lui demande de « valider » des décisions hors de son périmètre ou de gérer le planning… alors qu’à la base, il devait apporter un regard externe. On sort vite de son rôle d’expert pour devenir une “ressource à dispo”.

Dans ces cas-là, ce n’est pas une question de compétences, c’est une question de posture et de cadre. Si on ne définit pas qui pilote quoi, comment se passent les validations, combien de temps on consacre aux échanges… le client comble ce flou avec ses propres habitudes. Et c’est là qu’on se retrouve débordé·e.

💬 Mon petit conseil : pensez à intégrer à vos propositions ou devis un volet sur le process : étapes du projet, rôles respectifs, nombre d’aller-retours, modalités de validation. Ça change tout.

On a peur de perdre le client (ou de le froisser)

Allez, soyons honnêtes : même quand on est plus expérimenté, cette peur ne disparaît jamais totalement. On se dit : « Si je refuse, je vais perdre ce contrat », ou « Si je mets des limites, il va préférer un•e prestataire plus souple ».

Alors on cède. On accepte des planning intenables. On revient trois fois le brief. On allonge des prestations sans revoir nos devis.

Le problème ? Plus on s’efface, plus on adopte une posture qui ne valorise pas notre réelle expertise. Alors que finalement, un•e bon•ne freelance c’est quelqu’un qu’on vient chercher pour ses compétences certes, mais aussi pour sa vision, ses méthodologies et ses conseils !

Pourquoi c’est bloquant (pour nous et pour notre activté) ?

On devient interchangeable

Quand on laisse le client piloter et qu’on se contente d’exécuter ses envies au fil de l’eau, on finit par gommer toute notre valeur ajoutée.

On ne parle plus de notre expertise, de notre regard pro, de notre méthodo… on devient juste « celui qui fait » ou « celle qui exécute ». Et là, on devient facilement interchangeable. Nous qui avions bossé notre « positionnement », on vient finalement nous chercher « juste » pour nos compétences généralistes. Plus de différence avec le reste des prestataires du marché, plus d’ADN spécifique. On est de retour dans la grande marre des prestataires Fiverr.

Exemple vécu : une graphiste en freelance me racontait qu’au bout de quelques mois de mission, son client lui envoyait des mails du type « tu peux juste me faire ce visuel vite fait ? Ça va pas te prendre trop de temps ». Le process avait disparu, la réflexion amont aussi. Le client projetait même le temps imparti.

On bosse plus pour… moins de valeur

Quand on ne pose pas le cadre, on multiplie les aller-retours, les réunions non prévues, les ajustements hors périmètre. Et au final, on passe beaucoup plus de temps que prévu, souvent sans facturation en plus.

C’est le fameux « je fais trois versions de plus, pour que ça convienne à tout le monde », ou « je passe un appel de plus, ça prendra 10 minutes ». Sauf que ces petits extras mis bout à bout… ça grignote vite des heures entières de boulot.

Et soyons honnêtes : quand on travaille trop pour un projet qui ne nous rapporte pas ce qu’il devrait, la frustration monte. Et ça finit par peser sur la relation avec le client.

On finit par se démotiver (et ça se sent)

Le piège ultime : perdre le plaisir de bosser sur un projet.

Quand un client dirige tout, qu’on n’a plus d’espace pour apporter notre regard pro, qu’on passe notre temps à courir après des validations floues ou à ajuster les goûts de X ou Y… on se lasse. C’est humain.

Et le risque, c’est qu’à force, ça impacte aussi nos autres projets. On se démotive, on doute, on se dit qu’on n’a plus envie de « faire ça »… alors qu’en réalité, ce n’est pas le métier qui est en cause, c’est juste une mauvaise posture qu’on a laissée s’installer.

Comment construire une vraie posture de partenaire en freelance

Clarifier son rôle et poser le cadre dès le début

La clé, c’est de poser dès le départ les bases de la collaboration : qui fait quoi, comment, dans quel cadre.

Concrètement, ça veut dire :

  • Détailler les étapes du projet
  • Préciser le rôle et le périmètre de chacun (toi, le client, les éventuels autres intervenants)
  • Fixer le nombre d’aller-retours compris
  • Définir les points de validation
  • Poser un planning défini qui reprend les étapes clés et les temporalités de chacun
  • Mettre en place un outil de suivi et gestion du projet (sur Notion par exemple)
  • Cadrer les canaux et temps d’échange (ex : on ne gère pas un projet sur WhatsApp)

Je le vois très clairement sur mes projets : depuis que je formalise tout ça (par exemple avec un kit de cadrage dans la proposition commerciale), les projets sont plus fluides et les clients respectent mon temps et ma manière de bosser.

💬 Mon petit conseil : ne te dites pas « je verrai au fil de l’eau ». Plus on est clair dès le début, plus c’est simple ensuite de rappeler le cadre… et de le faire respecter 🙂 Le cadrage du projet est d’ailleurs un vrai levier pour asseoir cette posture. Si tu veux creuser ce sujet, je t’en parle plus en détail dans cet article sur la gestion de projet en freelance.

Apporter du conseil, challenger, proposer

Avoir une posture de partenaire, c’est aussi ne pas tout laisser passer. C’est oser dire : « je comprends ta demande, mais je pense qu’on pourrait faire autrement pour de meilleures raisons ».

Si on ne dit rien, on bascule en mode exécutant·e. Si on reprend la main et qu’on explique pourquoi on a fait tel choix, quelle logique on suit… là, on se positionne en expert·e qui accompagne. Tout ça demande d’être à la fois pédagogue, à l’écoute, droit•e dans ses baskets mais c’est un vrai game changer : à la fois pour la qualité de la mission, pour le soutien éclairé apporté à votre client et aussi pour le bien-être du déroulé de la mission.

💬 Mon petit conseil : habituez-vous à reformuler les demandes des clients pour les recadrer dans vos process. Ça montre que vous gardez la maîtrise de la démarche et intégrez le tout dans une démarche globale.

Soigner sa communication (et son assertivité)

Dire non quand il le faut, poser des limites… c’est crucial pour tenir une posture de partenaire. Mais ce n’est pas inné : ça se travaille.

On peut par exemple s’entraîner à répondre de manière pro quand un client :

1️⃣ Le client envoie des messages en dehors des horaires pros (soirées, week-ends), en s’attendant à une réponse immédiate.

Réponse possible : « Pour te garantir un suivi de qualité sur ton projet, je traite les échanges pendant mes horaires de travail. Je reviendrai vers toi lundi matin avec les éléments demandés. »

2️⃣ Le client relance plusieurs fois dans la journée pour avoir une réponse immédiate sur un point non urgent.

Réponse possible : « Je prends bien en compte ta demande. Pour que je puisse te répondre de façon complète et posée, je te propose de revenir vers toi demain après avoir traité les priorités en cours. »

3️⃣ Le client veut modifier les échéances du projet sans concertation (« finalement, on avance la deadline à la semaine prochaine »).

Réponse possible : « Si on avance la livraison, je vais devoir ajuster le planning des autres projets. Dis-moi si tu souhaites qu’on organise cela avec une prestation en express, je te prépare un devis complémentaire. »

4️⃣ Le client envoie des retours flous et contradictoires qui rendent le projet difficilement pilotable.

Réponse possible : « Pour qu’on puisse avancer efficacement, je te propose qu’on clarifie ensemble les priorités et qu’on valide les points étape par étape. Ça permettra d’éviter les aller-retours et d’avancer sereinement. »

Petit plus : utiliser un outil comme Loom pour envoyer des explications en vidéo permet souvent de désamorcer les incompréhensions et de fluidifier les échanges

Quand on cadre les échanges de façon claire et professionnelle, le client y gagne aussi : il comprend mieux le process, il sait à quoi s’attendre, il avance avec plus de visibilité… et au final, le projet est plus fluide et mieux maîtrisé pour tout le monde.

Accepter qu’on ne conviendra pas à tout le monde (et c’est ok)

Enfin, il faut aussi accepter que certains clients ne sont pas faits pour une relation de partenariat. Certains veulent juste du « quick & dirty », du pas cher, du « je pilote et tu exécutes ».

Et c’est ok ! Le vrai enjeu, c’est de savoir le détecter en amont (grâce à un process de cadrage, encore une fois), et de dire non à ces projets !

Perso, depuis que je filtre mieux les projets en amont, je me retrouve avec des clients qui respectent ma manière de travailler… et c’est un plaisir au quotidien (même s’il y a encore quelques loupés parfois :D).

💬 Mon petit conseil : n’aiez pas peur de refuser un projet. Ce n’est pas un échec, c’est une manière de protéger votre activité et de miser sur sa perenité (et notre santé mentale). Mieux vaut tenir le marathon que se cramer sur des projets non qualifiés. Et si vous voulez aller plus loin et poser les bases solides de votre posture, j’accompagne en 1:1 pour structurer tout ça. C’est par ici que ça se passe : découvrir ma formule d’accompagnement individuel.